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« Se préserver pour être éleveuse longtemps avec passion »

Pour se faciliter la vie, les éleveuses adaptent le travail, les équipements, ce qui profite aux éleveurs.

Comment la féminisation de l’élevage influe-t-elle sur les pratiques et les conditions de travail ? Ce 15 octobre, la journée internationale de la femme rurale nous donne l’occasion d’évoquer ce sujet à travers trois portraits vidéos d’éleveuses, publiés il y a quelques mois sur la chaîne Youtube de la MSA.

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Céleste n’est pas encore installée mais, en apprentissage sur l’exploitation familiale, elle porte déjà une attention particulière aux conditions de travail en élevage laitier. « Il y a des solutions pour limiter la pénibilité », met en avant la jeune femme qui n’hésite pas à « adapter » son « poste de travail ». Par exemple, pour nourrir les animaux, pas de seaux à porter, l’aliment est distribué au télescopique. « C’est plus facile », argue-t-elle. De même pour les barrières, en poste fixe, il n’y a pas à soulever, « juste à pousser ».

« Ne pas être toute cassée d’ici quelques années »

Son père lui a aussi fabriqué un marchepied pour la pesée des génisses. Ainsi, elle « ne se blesse pas les épaules avec la cage » et est « un peu surélevée », ce qui lui facilite la tâche. La future éleveuse travaille également au service de remplacement. Avant d’arriver sur les fermes, elle sait certes ce qu’elle va faire, « mais pas comment ». « Si c’est trop pénible pour moi, la prochaine fois, je dirai « non », lance-t-elle. Je choisirai des exploitations qui m’useront moins. »

Elle veut « se préserver » parce que son père « n’a pas assez fait attention à lui », pour pouvoir exercer le métier d’éleveuse le plus longtemps possible. Et, au niveau perso, continuer de monter à cheval. « Je dois surveiller mes postures, veiller sur moi, sur ma santé, si je ne veux pas être toute cassée, avoir mal partout, dans quelques années », insiste la future installée en élevage laitier. Ce n’est pas qu’une question de bonnes ou mauvaises positions. Se libérer du temps pour soi est tout aussi important.

« Travailler avec sa tête, plus que ses muscles »

L’installation de Sonia, 44 ans, remonte, elle, à une quinzaine d’années. En production allaitante sous statut individuel pendant 11 ans, jusqu’à ce que son mari la rejoigne, elle a pu s’appuyer sur sa Cuma. « Certaines choses, je ne sais pas faire, je veux bien que vous me montriez. », a-t-elle dit à ses membres. « Faut pas avoir peur de poser des questions », souligne l’agricultrice.

« Pouvoir se débrouiller seule et en sécurité »

Au début, elle a surtout rencontré des « freins physiques ». L’étable était entravée et, en l’absence de matériel adapté, il fallait curer tous les jours à la main. Le premier investissement a donc été de construire une nouvelle stabulation. Son système basé sur l’herbe lui permet, en outre, de « ne pas passer trop de temps sur le tracteur » : quand les vaches ne sont pas au pâturage, « que du foin à apporter, une fois par jour, le matin, avec repousse le soir », sans utiliser beaucoup de matériel.

« Nous travaillons peut-être plus avec notre tête que nos muscles », image l’exploitante qui a aménagé des couloirs de contention entre les bâtiments, des parcs, un box de vêlage. « Je peux effectuer plein d’interventions en autonomie et en toute sécurité. » Elle aussi juge essentiel de se dégager du temps pour elle et ses proches, comme pour se former, échanger avec d’autres éleveurs, s’engager professionnellement et sur le plan personnel. C’est une question « d’organisation, d’anticipation », fait-elle remarquer.

« Faire attention à soi, à santé et son équilibre »

Quant à Guylène, éleveuse de Limousines notamment depuis 1991, d’abord avec ses parents puis avec ses frères et sœurs et plus récemment sa fille, elle a vu le confort de travail s’améliorer d’année en année. L’alimentation, en particulier, est de plus en plus mécanisée et réduite à une fois par jour, ce qui limite l’astreinte. Même si elle n’est pas directement concernée, elle pointe cependant du doigt la traite et ses « gestes répétitifs », sources de divers « troubles et séquelles », auxquels on ne pense pas forcément quand on est jeune.

« Les jeunes générations y sont plus sensibles »

Les choses changent toutefois. Se préserver, avoir du temps libre, accorder de l’importance au confort de travail : les anciennes générations y étaient peu sensibles, les nouvelles, femmes comme hommes, le sont davantage et entendent parler de ces problématiques dès l’école. « La condition sine qua non pour que ma fille choisisse de devenir éleveuse », martèle Guylène. Si celle-ci ne voulait pas s’installer seule, elle tenait à pouvoir se débrouiller seule et a mis en place les aménagements nécessaires. Il importe de « garder le goût du métier », certains travaux bien sûr, tels que la traite, les mises bas, etc., restant « incompressibles ».

Céleste et Sonia abordent, par ailleurs, certaines difficultés spécifiques auxquelles elles ont été confrontées en tant que femme dans le monde de l’élevage. Céleste raconte avoir été accueillie avec méfiance et avoir dû faire « beaucoup plus ses preuves qu’un gars ». « Mais cela évolue », observe-t-elle. La seconde revient, quant à elle, sur le congé maternité des agricultrices, « pas simple à gérer ». Car certes, elles peuvent être remplacées, mais sans être complètement libres, « puisqu’il faut encadrer la personne, organiser ses journées, en même temps que s’occuper du bébé ».

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